L’UE refuse la punition annoncée par Trump et rendra coup pour coup
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L’UE refuse la punition annoncée par Trump et rendra coup pour coup
L’Union européenne répondra à la “punition” annoncée par Donald Trump mais les Américains doivent prendre la mesure des conséquences des actions hasardeuses décidées unilatéralement par leur président sur la base de données mensongères , car l’Union européenne a été une “bénédiction” pour les Etats Unis depuis sa création grâce aux revenus substantiels générés par les investissements américains sur le Vieux Continent. La Commission n’a pas fait dans la demi-mesure avec sa réponse aux commentaire insultant de Donald Trump sur une Union conçue pour ”entuber” les Etats-Unis.
Donald Trump va-t-il aller jusqu’au bout et imposer début mars des droits de douane de 25% sur toutes les importations européennes comme il l’a annoncé mercredi. Organisateur de combats de catch, Trump joue un personnage : menaces, annonces, effets de manche, mensonges, invectives: il a joué toute la gamme des postures des combattants des rencontres de “wrestling” et endossé le costume du “méchant” du ring. Mais ira-t-il au combat face à un adversaire bien préparé ?
La Commission garde la tête froide. “Cela fait plus d’un an que nous nous préparons à toutes les répercussions potentielles de droits de douane. Nous sommes prêts à faire face”. Olof Gill, le porte-parole pour le Commerce, la sécurité économique et les douanes, est imperturbable et froid. Bruxelles attend le passage à l’acte de Trump. “La balle est dans leur camp. Voyons ce qu’ils vont faire. Mais il vaudrait mieux qu’ils évitent de prendre de mauvaises mesures”, a-t-il mis en garde.
Les Européens ne vont pas dévoiler leur jeu. Personne ne sait quelles sont les intentions de Trump. Le président américain est vague, confus. Il fait des annonces, s’appuie sur des données fausses, lance des chiffres erronés. Jean-Claude Juncker, le premier président de la Commission européenne a avoir traité avec Trump en juillet 2018, pendant son premier mandat, se souvient de sa surprise devant la légèreté des arguments du président américain, de son ignorance des données. “Ce n’est pas un type très au fait des détails. C’est un deal maker”, a -t-il raconté à la Matinale Européenne. Juncker “le tueur violent”, comme l’avait surnommé Trump, avait obtenu la suspension d’une drôle de guerre commerciale avec des achats de soja et de gaz et les deux lutteurs s’étaient séparés en se donnant l'accolade.
En 2018, Trump était conseillé par des ministres compétents qui n’hésitaient pas à le contredire, a précisé Juncker. Sept ans plus tard, Trump a vieilli, il s’est entouré de courtisans, se repose sur le milliardaire Elon Musk, dont il défend les multiples intérêts, et est devenu revanchard. Il n’a toujours pas compris le fonctionnement de l’Union européenne et considère l’institution comme une ennemie.
Ursula von der Leyen, qui a succédé à Jean-Claude Juncker, se dit “prête au dialogue” et met en garde ses interlocuteurs américains: “Personne n’a rien à gagner d’une guerre commerciale”.
Trump n’a pour le moment montré aucune disposition au dialogue avec Mme von der Leyen et n’a pas répondu aux demandes de rencontre. La présidente de la commission a rencontré le vice-président J.D Vance et a envoyé à Washington son chef de cabinet et compatriote Bjoern Siebert.
Responsable des négociations commerciales pour l’UE, le commissaire européen au Commerce, le Slovaque Maros Sefcovic s’est rendu à Washington le 24 février et a rencontré le ministre du Commerce Howard Lutnick. Une occasion pour une mise au point sur les données économiques. “Il est exact que nous avons un surplus d'environ 150 milliards de dollars sur les biens. Mais les États-Unis disposent d'un surplus assez significatif, de plus de 100 milliards, sur les services, cela vient donc quasiment se compenser", a détaillé Sefcovic. "Nous parlons ici d'environ 50 milliards d'euros de déficit (américain) dans nos relations commerciales, sur un total de 1.600 milliards de dollars, je ne pense pas que ce soit quelque chose que nous ne pouvons pas surmonter", a-t-il insisté.
Buté, Donald Trump campe sur le chiffre d’un “déficit commercial de 300 milliards de dollars avec l’UE, qui n’accepte pas nos voitures, n’accepte pas nos produits agricoles et a été créée avec un seul propos, entuber les Etats-Unis”. Un vrai dialogue de sourds. “Nous sommes en train d’essayer de comprendre ce qui se passe”, a reconnu hier la Commission européenne. “Les droits de douane punitifs doivent être évités. Nous n’avons pas de détails sur la forme des droits de douane (annoncés par Trump). nous verrons leur répercussions et nous répondrons si nous devons répondre”, a déclaré Gill.
Donald Trump va-t-il déclencher une guerre commerciale ? En a-t-il les moyens ? L'économie américaine est-elle en mesure de supporter une guerre commerciale totale avec le reste du monde ? L’opinion publique américaine soutiendra-t-elle cette aventure, alors que le mécontentement grandit dans le pays contre les licenciements massifs décidés par Elon Musk dans les administrations ? Les marchés sont très nerveux et Wall Street est le baromètre. Donald Trump n’a pas donné de date pour le déclenchement des droits de douane contre l’UE. Juste un vague “bientôt”.
Les dirigeants de L’UE se réunissent le 6 mars à Bruxelles. Un sommet extraordinaire consacré au soutien à l’Ukraine avec la présence du président Volodymyr Zelensky et à la défense européenne en réponse au désengagement américain à l’Otan. S’il passe à l’acte, Trump devrait déclencher sa guerre commerciale le 4 mars. Dans ce cas, le sommet extraordinaire pourra rapidement organiser la riposte. Trump peut chercher à diviser les Européens. “Il est techniquement possible d'imposer des droits de douane à tel ou tel pays de l’UE”, a reconnu Olof Gill. Mais l’UE est un grand marché et ses membres se préparent à affronter la tempête unis.
“Nous défendrons nos intérêts contre ceux qui veulent attaquer les économies européennes avec des tarifs absolument injustifiés qui menacent secrètement notre souveraineté économique. Nous sommes déterminés et prêts à le faire. L’Espagne et l’UE travaillent depuis des mois. Nous prendrons des mesures de réponse proportionnées au défi. Nous le ferons ensemble, avec une aide spécifique et extensive aux secteurs de notre économie qui pourraient être affectés par une guerre commerciale injuste et injustifiée qui, nous l'espérons, n'aura pas lieu “, a affirmé hier le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez. Et le futur chancelier allemand Friedrich Merz ne se montre pas homme à plier devant Donald Trump. Il faut espérer une position aussi ferme de l’Italienne Giorgia Meloni, premier ministre de la 3e économie de l’UE, car son positionnement pro-Trump intrigue. “Pour le moment les 27 font bloc. On a tous beaucoup à y perdre mais on n’a pas d’autre choix que de répliquer et on va le faire sur l’acier et l’aluminium”, a assuré à la Matinale européenne un haut responsable européen impliqué dans la riposte européenne.
“Donald Trump est connu pour être un maître de l’imprévisibilité. Mais la direction de son deuxième gouvernement est désormais claire. Elle menace l’avenir de l’Union européenne et des Européens”, avertissent deux spécialistes des relations commerciales, Elvire Fabry et Micol Bertolini, dans une analyse publiée hier par la Fondation Notre Europe. L’UE est mieux préparée et s’est dotée d’instruments de défense. “La possibilité d’utiliser plusieurs des ces instruments à la fois peut être un facteur de dissuasion”, soulignent les deux chercheurs. “L’effet dissuasif dépendra beaucoup de la démonstration rapide de la volonté politique des Etats membres de répondre”, insistent Fabry et Bertolini.
La citation
"C'était vraiment surprenant de voir les États-Unis dans le même groupe que le Nicaragua, Haïti, la Corée du Nord, la Russie, la Biélorussie, le Mali, le Soudan. Il semble que les États-Unis aient un nouveau groupe d'amis”.
La Haute représentante de l'UE pour la politique étrangère, Kaja Kallas.
Sommets
Costa invite Zelensky au Conseil européen extraordinaire du 6 mars – Le président du Conseil européen, Antonio Costa, a également invité Volodymyr Zelensky au sommet extraordinaire qui se tiendra le 6 mars à Bruxelles. Les chefs d'État et de gouvernement doivent discuter et décider des garanties de sécurité à fournir à l'Ukraine et du renforcement de la défense européenne. Dans la lettre d'invitation aux dirigeants, Costa a demandé de discuter des "principes" qui seront suivis face aux négociations entre les États-Unis et la Russie. "L'UE et ses États membres sont prêts à prendre plus de responsabilités pour la sécurité de l'Europe. Nous devons donc être prêts pour une éventuelle contribution européenne aux garanties de sécurité qui seront nécessaires pour assurer une paix durable en Ukraine", a écrit Costa. Le président du Conseil européen a également annoncé les "premières décisions à court terme" sur la défense européenne.
Poutine ravi de Trump - Le dirigeant russe, Vladimir Poutine, a déclaré hier que les premières négociations avec l'administration Trump "inspirent un certain degré d'espoir", alors que le président américain aligne ses positions sur celles de la Russie sur plusieurs questions de politique internationale, à commencer par la guerre en Ukraine. Hier, à Istanbul, une deuxième réunion a eu lieu entre les dirigeants diplomatiques des États-Unis et de la Russie après la rencontre de Riyad. "Il y a une volonté réciproque de travailler pour rétablir les relations intergouvernementales et aborder le vaste nombre de problèmes systémiques et stratégiques accumulés dans l'architecture mondiale, qui ont déclenché à la fois la crise ukrainienne et d'autres conflits régionaux", a déclaré Poutine. Le discours a été prononcé lors d'une réunion avec les dirigeants des services secrets du FSB.
La France propose des stocks d'armes pour l'Ukraine sur le territoire de l'UE – Le ministre français des Forces armées, Sébastien Lecornu, a déclaré hier qu'il proposerait à ses partenaires européens de constituer sur leur territoire des "stocks d'armes" à transférer à l'Ukraine en cas de besoin pour dissuader la Russie de nouvelles agressions. "Les garanties de sécurité comprennent plusieurs niveaux potentiels", a expliqué Lecornu. "La question de l'accumulation de stocks d'armes en Europe (...) pour l'Ukraine constitue un moyen de dissuader une éventuelle reprise de la guerre." Lecornu a reconnu qu'une réflexion est en cours sur l'envoi de contingents européens en cas d'accord de cessez-le-feu. Mais "la meilleure garantie de sécurité pour l'Ucraine est l'armée ukrainienne", a déclaré le ministre français. "Ce qui est en jeu dans les discussions actuelles, c'est de garantir que l'armée ukrainienne continue d'être capable de se défendre non seulement en ce moment, mais aussi lorsque les armes se tairont”.
Autriche
Accord pour former un gouvernement de coalition centriste et pro-européen – Les trois principaux partis centristes en Autriche ont conclu hier un accord pour former un gouvernement de coalition, évitant ainsi le scénario d'élections anticipées et excluant le parti d'extrême droite FPO du pouvoir à Vienne. Les conservateurs de l'OVP, les sociaux-démocrates du SPO et le parti libéral NEOS ont présenté un programme d'environ 200 pages, mettant fin aux plus longues négociations pour former un gouvernement en Autriche depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les élections du 29 septembre 2024 s'étaient soldées par le succès du FPO. Une première tentative de former un gouvernement centriste avait échoué, mais les négociations entre les conservateurs de l'OVP et l'extrême droite du FPO n'ont pas abouti non plus. C'est la première fois depuis les années 1940 que l'Autriche aura une coalition tripartite. "Je m'attends à ce que nous trois puissions former un gouvernement lundi", a déclaré le leader de l'OVP, Christian Stocker, favori pour devenir le prochain chancelier. Son parti conservateur obtiendra également le ministère de la Défense et de l'Intérieur, tandis que le SPO obtiendra le ministère des Finances et de la Justice. Les libéraux de Neos devraient diriger les ministères des Affaires étrangères et de l'Éducation. Le leader du FPO, Herbert Kickl, a qualifié l'alliance de "coalition de perdants" et a demandé des élections anticipées.
Une coalition pro-ukrainienne et pro-Pacte de stabilité – L'exclusion du FPO du gouvernement à Vienne permet de resserrer les rangs européens. L'accord de coalition des trois partis centristes prévoit de soutenir le principe selon lequel il ne doit pas y avoir de négociations de paix sur l'Ukraine sans la participation de l'Ukraine. Le prochain gouvernement travaillera également sur une stratégie de diversification du gaz. Sur le front économique, la coalition centriste cherchera à éviter la procédure de déficit excessif par des économies de 6,3 milliards cette année et de 8,7 milliards l'année prochaine. Le gouvernement augmentera un prélèvement sur les banques pour passer de 150 millions d'euros aujourd'hui à 500 millions d'euros au cours des deux prochaines années. De plus, les taxes extraordinaires sur les sociétés d'électricité et de combustibles fossiles seront étendues.
Ce que prévoit l'accord de coalition en Autriche sur l'immigration – Les trois partis sont centristes et pro-européens, mais l'accord de coalition indique la volonté de suivre une ligne dure sur l'immigration. Le prochain gouvernement suspendra le regroupement familial pour les réfugiés, soutiendra des "concepts innovants avec des pays tiers pour prévenir l'immigration illégale dans le domaine de la protection et du rapatriement", et s'opposera aux programmes de relocalisation de l'UE. L'accord prévoit également de créer une base juridique pour saisir les biens des demandeurs d'asile à leur arrivée, à l'exception des effets personnels, pour couvrir certaines de leurs dépenses de subsistance comme le logement. En cas d'augmentation des demandes d'asile, le prochain gouvernement se réserve le droit de cesser d'accepter les demandes de protection internationale. La coalition veut également rendre la diffusion de propagande islamiste illégale et introduire des mesures pénales plus sévères contre "l'islam politique".
Hongrie
Orban veut modifier la constitution pour interdire la Pride – Le gouvernement de Viktor Orban prévoit de modifier la constitution hongroise pour introduire des règles sur la protection des mineurs qui empêcheraient la tenue de la Pride de la communauté LGBT. Hier, Gergely Gulyas, le chef de cabinet du Premier ministre, a expliqué que la constitution serait modifiée pour affirmer que le droit d'un enfant au développement physique, mental et moral "a la priorité sur tous les autres droits, sauf le droit à la vie". Gulyas a explicitement visé la Pride. "La collision entre le droit de réunion et le droit des enfants à un développement sain doit être clarifiée", a déclaré Gulyas. "Le pays ne doit pas tolérer que la Pride défile au centre de Budapest”.
Cela se passe aujourd'hui
Commission : visite du collège des commissaires à New Delhi en Inde ; conférence de presse de la présidente von der Leyen avec le Premier ministre indien, Narendra Modi
Commission : le commissaire Hansen à Paris visite le Salon international de l'agriculture
Eurostat : données sur l'acquisition de la citoyenneté en 2023 ; données sur l'écart entre les sexes en 2023