Ursula vire Breton de la Commission et met a nu la faiblesse de Macron
Bonjour! Je suis Christian Spillmann et avec David Carretta nous vous proposons La Matinale Européenne, un instrument pour offrir une analyse, un contexte et une perspective à ceux qui s'intéressent à l'UE.
N'oubliez pas de soutenir la Matinale en souscrivant à un abonnement payant.
Ursula vire Breton de la Commission et met a nu la faiblesse de Macron
Ursula von der Leyen a obtenu la tête du Français Thierry Breton. Les deux ne s’entendaient guère mais étaient complémentaires. La présidente a laissé sa rancœur dominer pour faire preuve d’autorité. Emmanuel Macron a lâché un candidat expérimenté et reconnu pour recaser Stéphane Séjourné, un fidèle, mais un poids plume .Ursula von der Leyen se débarrasse ainsi de la dernière voix critique de son premier collège et compose une équipe à sa main, dominée par le Parti Populaire Européen, au sein de laquelle la Socialiste Teresa Ribera et la Libérale Kaja Kallas vont avoir du mal à exister.
“La nomination de la nouvelle Commission européenne dégénère peu à peu en un théâtre de l’absurde”. L’eurodéputé SPD allemand Bernd Lange a trouvé les mots justes pour décrire la pantomime jouée lundi. Un cadre vide posté sur X par Thierry Breton avec une légende elliptique: “mon portrait officiel pour le prochain mandat de la Commission européenne”, suivi d’un second message pour annoncer sa démission avec la copie de la lettre peu amène adressée à Ursula von der Leyen. Le ton est dur et l’accusation est violente: “Vous avez demandé à la France de retirer ma candidature pour des raisons personnelles, que vous ne m’avez pas exposées, et fait un marché politique avec l’offre d’un portefeuille plus important pour la France au sein du nouveau collège”. En bref, Ursula von der Leyen est accusée d’avoir exercé un chantage sur la France pour obtenir la tête de Thierry Breton. Elle a réussi.
L'équipe von der Leyen s’est retranchée derrière “la confidentialité” du processus engagé entre la Présidente et les dirigeants pour la composition de son collège et a insisté sur les deux critères requis: “la compétence et la parité”. Emmanuel Macron aurait pu désigner une femme pour remplacer Thierry Breton et répondre ainsi favorablement à la demande de parité au sein du collège. C’est ce qu’à fait le gouvernement slovène dirigé par le Libéral Robert Golob (Renew), plongé dans la tourmente après cette décision. Au lieu de cela, Emmanuel Macron a désigné un de ses proches et opté pour un profil bas.
Personne n’ose mettre en doute les compétences de Thierry Breton pour un nouveau mandat de commissaire. Ursula von der Leyen le remercie pour son travail pendant la précédente commission, notamment “les progrès sur les services numériques”, a précisé sa porte-parole. Très court comme remerciement. En fait, sans le concours de Thierry Breton, Ursula von der Leyen aurait fait naufrage. “Avec la démission de Thierry Breton, la Commission européenne - et la France– perdent l'un de ses plus entreprenants et opiniâtres commissaires. Une force de travail à qui Ursula von der Leyen doit plusieurs avancées concrètes: plan vaccination, DSA/DMA, EDIP, ASAP... plus l'amorce d'une politique industrielle”, résume Sébastien Maillard, l’ancien directeur de l’Institut Jacques Delors, dans un message sur X. Tout est dit.
“D'une grande violence politique, le départ forcé de Thierry Breton ne peut s'expliquer que par des relations personnelles exécrables avec Ursula von der Leyen, l’exigence de parité Femme/Homme dans la Commission, l’espoir d'un portefeuille plus ample, le besoin de recasage post-dissolution”, commente Sébastien Maillard. Nos informations confirment trois des quatre motifs recensés. Ursula von der Leyen a bien fait chanter Emmanuel Macron. Elle lui a proposé un portefeuille très insatisfaisant pour Breton et a accepté de le muscler à la condition de changer de candidat. Le chef de l’Etat a cédé. Ursula von der Leyen n’a jamais pardonné à Thierry Berton d’avoir publiquement critiqué sa gestion de la Commission, le manque de collégialité dans ses décisions, la conflictualité dans les relations avec les commissaires.
Thierry Breton a publiquement dénoncé ces travers dans une lettre cosignée par le Haut représentant, l’Espagnol Josep Borrell, le commissaire aux affaires économiques et monétaires, l’Italien Paolo Gentiloni et le commissaire aux Affaires sociales le Luxembourgeois Nicolas Schmit. Trois socialistes et un Libéral. Il a décidé de rendre publique sa lettre de démission et les accusations qu’il porte sont dévastatrices pour l’image d’Ursula von der Leyen. “Il y a beaucoup de porcelaine brisée en ce moment. Malheureusement, ce n’est pas de bon augure pour l’avenir”, commente Bernd Lange.
Mais avec le limogeage de Thierry Breton, tous les rebelles ont été dégagés. Ursula von der Leyen à les mains libres pour un contrôle total sur sa Commission. Teresa Ribera, Kaja Kallas et Stéphane Séjourné sont des novices. Le nouveau collège compte avec sa présidente quatorze commissaires membres du Parti Populaire Européen, cinq commissaires Renew, dont Kallas et Séjourné, cinq socialistes, dont Ribera et le slovaque Sefcovic - mais ce dernier n’est pas reconnu par les socialistes comme un des leurs - un membre du parti eurosceptique des Conservateurs et Réformistes (ECR), l’Italien Raffaele Fitto, un membre du parti du dirigeant souverainiste hongrois Viktor Orban, Oliver Varhelyi, inscrit comme indépendant comme le candidat commissaire chypriote Kostas Kadis.
Ursula von der Leyen veut présenter son équipe aujourd'hui à Strasbourg et permettre ainsi l’ouverture des auditions. Les groupes socialiste et Renew ont fait connaître leur mécontentement contre certains candidats et certaines attributions. Renew refuse que l’Italien Fitto soit vice-président exécutif et que lui soit attribué un portefeuille économique, mais le groupe n’est pas soutenu dans son refus. Un nouveau psychodrame européen va se jouer. Il devrait avoir peu de conséquences.
Les Etats membres restent les décideurs. Mais certains rois sont nus. La France va obtenir le portefeuille qu’elle demandait et une vice-présidence exécutive. Mais Emmanuel Macron a laissé beaucoup de son autorité européenne avec le lâchage de Thierry Breton. L’Allemagne prend la main, mais Olaf Scholz va sans doute la passer l’an prochain au patron de la CDU Friedrich Merz, hostile aux recommandations de Mario Draghi pour éviter le déclassement. L’Europe risque une longue agonie, a averti l’ancien président de la Banque Centrale Européenne.
La citation
“Thierry Breton a porté avec nous la production d’armes pour l’Ukraine ou de vaccins, une ambition industrielle, la régulation des grandes plateformes, à commencer par X... Son départ forcé est un très mauvais signal. Sur le fond et sur la forme.
Emmanuel Macron, pourquoi céder?”
Raphael Glucksmann.
Commission von der Leyen II
Musk et l'extrême droite célèbrent la sortie de Breton - Ursula von der Leyen n'est pas la seule à se réjouir d'être débarrassée de Thierry Breton. Elon Musk est resté étrangement silencieux après s'être battu avec l'ancien commissaire français au sujet de la réglementation européenne imposée aux géants du numérique, dont son réseau social X. M. Musk a laissé au PDG de X le soin de commenter. “C'est un bon jour pour la liberté d'expression”, a écrit Linda Yaccarino sur X. L'extrême droite européenne a également applaudi la sortie de M. Breton. “L'annonce de la démission de Thierry Breton est une bonne nouvelle pour tous ceux qui, en Europe et dans le monde, chérissent le principe sacro-saint de la protection de la liberté d'information et d'expression”, a déclaré Paolo Borchia, chef de délégation de la Ligue de Matteo Salvini et membre du groupe “Patriotes pour l'Europe”.
Mme Vestager hérite des compétences de M. Breton, la France se retrouve sans commissaire - La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a annoncé hier qu'elle avait confié à la vice-présidente Margrethe Vestager les compétences de M. Thierry Breton, à la suite de la démission surprise du commissaire français. Outre le marché intérieur, M. Breton était chargé de l'industrie, du numérique, de la défense et de l'espace. Fait sans précédent, la France restera sans représentant au sein du collège des commissaires jusqu'à l'entrée en fonction de la prochaine Commission.
Von der Leyen devant le Parlement européen pour présenter sa structure et son collège - La démission de Thierry Breton n'empêchera pas Ursula von der Leyen de présenter aujourd'hui son collège à la Conférence des présidents du Parlement européen. La nomination de Stéphane Séjourné, ministre français des Affaires étrangères et ancien président du groupe Renew, permet à Mme von der Leyen d'aller de l'avant. Sur le plan juridique, c'est la Slovénie qui pose problème. La commission des affaires européennes du Parlement slovène n'a pas encore confirmé la nomination de Marta Kos à la place de l'ancien candidat Tomaz Vesel. Cependant, Mme von der Leyen est pressée et prête à utiliser un expédient. “Le Parlement européen est impatient de discuter de la structure et des portefeuilles proposés pour la Commission européenne, tels qu'ils sont définis dans nos nouvelles règles. Nous entamerons ensuite le processus nécessaire de contrôle parlementaire et d'auditions. Le Parlement est prêt”, a déclaré hier sa présidente Roberta Metsola. Les formalités préalables à l'audition des commissaires, à commencer par l'examen des conflits d'intérêts potentiels par la commission des affaires juridiques, risquent encore de retarder le processus.
Présidence hongroise
Orban annule Strasbourg en raison des inondations, mais pas la controverse sur l'UE - Le premier ministre hongrois, Viktor Orban, a annoncé hier qu'il avait annulé ses engagements internationaux prévus cette semaine en raison des inondations dévastatrices qui ont frappé l'Europe centrale, y compris un débat au Parlement européen sur le programme de la présidence du Conseil de l'UE. Les inondations n'ont pas empêché M. Orban de poursuivre sa campagne contre l'UE sur la question des migrants. Après son annonce sur l'annulation des engagements internationaux, le premier ministre hongrois a posté un message sur X dénonçant le “chaos politique” causé par la décision de l'Allemagne de réintroduire les contrôles aux frontières, alors que “la Hongrie est punie pour avoir défendu les frontières extérieures de l'UE”. La présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, a annoncé qu'au lieu de la présidence hongroise, les députés européens débattront des inondations en Europe centrale et de la préparation de l'UE à répondre à ces catastrophes exacerbées par le changement climatique.
Géopolitique
Les vingt-sept se débattent avec les nœuds du prêt à l'Ukraine - Les ambassadeurs des vingt-sept États membres ont eu hier une nouvelle discussion sur le prêt de 50 milliards de dollars que le G7 s'est engagé à accorder à l'Ukraine d'ici la fin de l'année pour la mettre à l'abri du risque d'un retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. Le chef de cabinet d'Ursula von der Leyen, Björn Seibert, a présenté un document avec trois options pour utiliser les avoirs gelés de la Russie. L'objectif est de répondre à la demande américaine d'un flux régulier de bénéfices exceptionnels pour rembourser le prêt. La période de sanctions devrait être prolongée. Dans les prochains jours, les ambassadeurs devraient indiquer laquelle des trois options est privilégiée afin de permettre à la Commission de poursuivre les négociations avec les États-Unis et de soumettre une proposition formelle. Mais, selon le Financial Times, la menace de veto de Viktor Orban pousse à un « plan B » : fournir un prêt unilatéral de 20 à 40 milliards d'euros à l'Ukraine, à adopter à la majorité qualifiée avec un nouveau programme d'assistance macrofinancière.
Starmer presse Meloni de lever les restrictions sur les armes en Ukraine - “Je pense qu'il est très important, par principe, de placer l'Ukraine dans la meilleure position possible, et c'est ce dont nous avons parlé”, a déclaré hier le Premier ministre britannique Keir Starmer lors d'une conférence de presse avec Giorgia Meloni, interrogée sur la levée des restrictions imposées à l'Ukraine sur les armes fournies par l'Occident pour frapper en profondeur la Russie. Le gouvernement italien a rejeté à plusieurs reprises les appels lancés par le président ukrainien, Volodymyr Zelensky. Mme Meloni a réitéré son opposition à la levée des restrictions. “En Italie, comme vous le savez, cette autorisation n'est pas en discussion aujourd'hui, mais il s'agit de décisions que nous partageons évidemment avec nos alliés”, a expliqué le Premier ministre italien.
Migrants
Starmer veut apprendre de Meloni - Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, a déclaré vouloir jeter un regard pragmatique sur la politique de Giorgia Meloni visant à réduire les flux migratoires. M. Starmer s'est dit “très intéressé” par les mesures prises par l'Italie dans les pays situés de l'autre côté de la Méditerranée, car elles ont permis de réduire les arrivées de migrants “de manière assez significative”. “J'ai toujours dit qu'il valait mieux empêcher les gens de quitter leur pays que d'essayer de gérer ceux qui sont arrivés dans n'importe lequel de nos pays”, a expliqué M. Starmer. Le premier ministre travailliste, qui a annulé le plan rwandais d'expulsion des demandeurs d'asile vers le pays africain, n'exclut pas d'utiliser le modèle albanais adopté par Meloni pour externaliser les procédures d'asile. “Nous sommes avant tout pragmatiques : lorsque nous voyons un défi, nous discutons avec nos amis et alliés des différentes approches adoptées et nous voyons ce qui fonctionne”, a déclaré M. Starmer. “Le programme albanais n'est pas encore opérationnel, mais nous avons discuté du concept”.
Juncker contre les frontières physiques et mentales - “Nous ne devons pas permettre que des frontières soient à nouveau créées dans la tête et le cœur des gens”, a déclaré l'ancien président de la Commission Jean-Claude Juncker, commentant la décision de l'Allemagne de réintroduire des contrôles aux frontières intérieures en tant qu'exception aux règles de Schengen. La Commission d'Ursula von der Leyen est restée silencieuse après l'annonce du gouvernement d'Olaf Scholz. “Nous sommes en contact avec les autorités allemandes et celles des autres Etats membres”, ont déclaré hier les porte-parole de la Commission. Les idées de M. Juncker sont plus claires. “Je ne suis pas favorable aux contrôles aux frontières” et “je vois cela avec inquiétude”, a déclaré le Luxembourgeois. “En ce qui concerne la question des réfugiés, des immigrés et des immigrés clandestins, il ne semble pas approprié d'effectuer des contrôles fixes aux frontières pendant une longue période”. Cependant, même la Commission Juncker n'avait pas agi de manière décisive en 2015-16 lorsqu'un certain nombre d'États membres - dont l'Allemagne - avaient imposé des contrôles aux frontières en raison de la crise des réfugiés. Certains sont encore en place aujourd'hui.
Géoéconomie
Les fabricants chinoises n'ont plus le temps de s'engager pour éviter les droits de douane - Au cours du week-end, certains fabricants chinois ont envoyé à la Commission une nouvelle proposition de compromis pour éviter les droits de douane sur les voitures électriques produites en Chine. Mais le temps est déjà écoulé depuis longtemps. “En ce qui concerne les offres d'engagements de prix, la date limite pour les soumettre était le 24 août”, a déclaré un porte-parole de la Commission : “Il n'y a pas de possibilité d'offrir des engagements de prix au-delà de cette date limite”. Toutefois, la Commission “reste ouverte à la recherche d'une solution négociée avec les autorités chinoises”, a ajouté le porte-parole. Le jeudi 19 septembre, le ministre du commerce de Pékin, Wang Wentao, sera à Bruxelles pour rencontrer le vice-président de la Commission, Valdis Dombrovskis. Hier, M. Wang a eu une réunion en tête-à-tête avec le ministre italien du Made in Italy, Alfonso Urso, qui a confirmé son soutien à la Commission en ce qui concerne les droits de douane afin de rétablir des conditions de concurrence équitables. Le vote des États membres sur la proposition d'imposer des droits compensatoires est prévu pour le 25 septembre.
Pacte vert
La Cour des comptes épingle la Commission et les gouvernements au sujet de la ressource propre provenant des plastiques non recyclés - La Cour des comptes de l'UE a déclaré hier que l'introduction d'une nouvelle ressource propre pour le budget de l'UE, basée sur les déchets d'emballages plastiques non recyclés, n'a pas fonctionné aussi bien qu'elle l'aurait dû. La Cour a mis en évidence des retards et des incohérences dans la transposition de la directive par la majorité des États membres, ainsi que des faiblesses dans la méthode de calcul de cette nouvelle recette. Selon l'audit, la ressource propre fondée sur les matières plastiques pour 2021 a été sous-estimée de 1,1 milliard d'euros en raison d'incohérences dans les calculs. Ces recettes devraient contribuer au remboursement de la dette de NextGenerationEu et inciter à réduire la consommation de produits plastiques à usage unique. La contribution nationale est calculée sur la base d'un montant de 0,80 euro par kilogramme de déchets d'emballages plastiques non recyclés. En 2023, les recettes provenant de la ressource propre fondée sur les matières plastiques s'élèvent à 7,2 milliards d'euros, soit 4 % des recettes totales du budget de l'UE.
Cela se passe aujourd'hui
Commission : la présidente von der Leyen présente le nouveau collège à la Conférence des présidents du Parlement européen
Commission : réunion hebdomadaire du collège des commissaires
Parlement européen : session plénière à Strasbourg (débats sur le maintien du soutien à l'Ukraine ; les mesures globales sur les plateformes de médias sociaux pour protéger la démocratie ; le rapport de Mario Draghi sur l'avenir de la compétitivité européenne ; l'état de l'Union de l'énergie ; la guerre à Gaza et la situation au Moyen-Orient ; la situation au Venezuela ; les résultats du G20 à Rio de Janeiro).
Présidence hongroise de l'UE : réunion informelle des ministres de la recherche à Budapest
Commission : discours du commissaire Gentiloni à l'assemblée générale d'Eurostat à Luxembourg
Commission : la vice-présidente Jourova rencontre la ministre danoise des affaires européennes, Marie Bjerre
Commission : discours du commissaire Kyriakides au Congrès mondial du cancer
Parlement européen : conférences de presse des présidents des groupes politiques
Parlement européen : conférence de presse de Mounir Satouri sur les femmes en Afghanistan
Conseil : réunion du Comité politique et de sécurité